04 67 06 09 09
Prix d’un appel local
Prix d’un appel local

Les nouvelles
pratiques funéraires

« -Je suis le professionnel de l’étape dans le domaine du funéraire, surtout un étonné, passionné par les mutations qu’il y a actuellement dans le rapport de la société à la mort qui se traduit par des modifications actuellement extrêmement importantes des rituels funéraires parfois par l’absence de rituels funéraires, alors vous pourrez vous dire c’est Paris par rapport à un certain nombre de faits dont je vais vous faire part ; tous les chiffres que je vais vous donner s’entendent au niveau national, c’est bien d’un phénomène national dont on va parler et effectivement il y a des phénomènes qui sont accentués dans les métropoles, mais on s’aperçoit que ce sont des phénomènes qui se diffusent partout dans la société, ce qui a court dans les métropoles risque d’advenir dans des zones rurales, dans des plus petites villes. ..

La mort, un sujet toujours difficile à partager

Il est toujours difficile de parler du sujet de la mort, même pour des scientifiques qui souvent reportent le sujet de la mort sur leur propre vécu. Je parle de tabou mais le politique ne parle jamais de la mort et c’est le reflet de l’ensemble de la société, on fuit la mort, il y a un véritable tabou.

La nouvelle démographie et le rapport à la mortalité

Les bouleversements démographiques expliquent les évolutions des pratiques funéraires. C’est un lieu commun de dire que l’espérance de vie augmente énormément : chaque année depuis 70 ans nous gagnons 1/4 d’année d’espérance de vie , chaque année une espérance de vie qui maintenant s’élève à plus de 85 ans pour les femmes, presque 80 ans pour les hommes et on a une progression qui est vraiment continue. Ça ne veut pas dire ce soit une espérance de vie en bonne santé laquelle évolue beaucoup plus lentement. La mortalité infantile a été quasiment éradiquée en un siècle, on avait 30 % de décès d’enfant avant un an, 15 % encore au début du XX ième siècle, rappelez-vous la canicule de 2003, en 1911 il y a eu 20 000 morts d’enfants de moins d’un an, imaginez en 2003 qu’il y ait eu 10 enfants qui soient morts et bien le gouvernement tombait. La vie était indissolublement liée à la mort puisqu’il y avait beaucoup de mort pendant les accouchements. En 1950 on était déjà passé à 5 % et en 2011 la mortalité natale a complètement disparu du paysage, c’est quelque chose qui est extrêmement rare et c’est d’autant plus difficile à gérer pour les parents, notamment les femmes parce que ce n’est pas reconnu comme un phénomène social, qu’on a pas le droit d’en parler, c’est morbide de parler de la mort particulièrement de ça…

Les causes de la mort ont changé notre rapport à la mort

La mort a également changé de nature, en 1925 on avait deux fois plus de mort du à des maladies infectieuses qu’à des cancers, la maladie infectieuse c’était quelque chose qui touchait tout le monde, c’était une cause de la mort qui était familière, d’un seul coup en 2000 on a 40 fois plus de décès dus à des cancers qu’à des maladies infectieuses grâce à la vaccination, avec la vieillesse on a la prévalence des maladies dégénératives, les Alzheimer, les démences séniles, etc…La brutalité et l’individualité des morts subites dues à des causes cardiovasculaires, on est passé d’une mort qui était souvent du à des causes d’une maladie infectieuse à des causes qui étaient familières, à des causes essentiellement individuelles et qui font peur quelque part…

Face au deuil, des réalités très différentes

Cela nous amène à considérer qu’il n’y a pas le deuil mais il y a énormément de cas extrêmement différents dans le deuil, il y a la mort des personnes très âgées : quand une personne de 70 ans inhume son parents âgé presque centenaire, la personne de 70 ans est déjà rentrée dans la vieillesse, elle a déjà pensée à sa propre mort, donc elle a absolument pas le même rapport à la mort de l’autre qu’elle aurait pu avoir 20 ans plus tôt. On la question de la mort sociale avant la mort physique, l’espérance de vie en bonne santé ne va pas du tout à la même vitesse que l’espérance de vie, donc on a de plus en plus de gens qui sont pendant longtemps désocialisés à cause de maladie dégénérative, le lien social s’est complètement rompu depuis des années, et quand la mort physique advient, c’est la fin d’une époque, il y a un peu de nostalgie, mais il n’y a plus de peine souvent.

La fin de vie en milieu hospitalisé

Les personnes qui décèdent à la suite d’un séjour en soin palliatifs, ces lieux extraordinaires où l’hôpital s’humanise, où on a plus une maladie mais un patient, où on a pas seulement un patient mais son entourage, il y a une préparation de ce qui va advenir, souvent par exemple on incite les personnes de l’entourage des personnes qui vont décéder en soins palliatifs à aller faire des devis avant la mort, donc quand ils organisent des obsèques, les choses se passent de façon complètement différente, à l’inverse quand un jeune senior de 55 ans meurt en jouant au tennis, quand ça devient extrêmement brutal, il y a les morts contre l’ordre des choses, quand les parents s’occupent des obsèques de leurs enfants, avec l’allongement de la durée de vie c’est de plus en plus fréquent. Puis il y a la mort périnatale, qui est un drame sans nom, d’autant plus que les projets de maternité ne sont plus du tout les mêmes, une femme ne tombe plus enceinte, c’est un projet d’enfant beaucoup plus tard donc si ce projet n’aboutit pas si cet enfant décède dans le ventre de sa mère, c’est une catastrophe.

Source : retranscription libre France Culture
Entretien enregistré en septembre 2017 dans le cadre du colloque “Que vont devenir les cimetières en Normandie, et ailleurs ?”, sous la direction de Jacky Brionne, Gaëlle Clavandier et François Michaud-Nérard. François Michaud-Nérard, fondateur de la société d’économie mixte “Services Funéraires de la Ville de Paris”. Administrateur de l’Union du Pôle Funéraire Public, il est membre titulaire du Conseil national des Opérations Funéraires et du bureau de l’European Crematoria Network.